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Mardi, 18 novembre 1828.

Gœthe a parlé d’un nouvel article de la Revue d’Edimbourg. « C’est un plaisir, a-t-il dit, de voir à quelle élévation, à quelle solidité parviennent les critiques anglais de nos jours. De l’ancien pédantisme plus une trace, et, pour le remplacer, de grandes qualités. Dans le dernier article sur la littérature allemande on trouve cette assertion : Il y a parmi les poëtes des gens dont le penchant est de vivre toujours avec les idées que tout autre aime à chasser de son esprit. — Eh bien ? qu’en dites-vous ? au moins nous savons cette fois où nous en sommes, et nous n’ignorons plus dans quelle catégorie nous devons ranger une grande partie de nos littérateurs contemporains[1]. »

* Mercredi, 3 décembre 1828.

Aujourd’hui j’ai fait une plaisanterie assez originale avec Goethe. Madame Du val, de Cartigny, dans le canton de Genève, dame très-habile dans la confection des confitures, m’avait envoyé comme produits de son habileté quelques cédrats destinés à la grande princesse et à Goethe, dans la pleine certitude que ses confitures surpassaient toutes les autres autant que les poésies de Goethe surpassent les poésies de la plupart de ses rivaux allemands. La fille aînée de cette dame désirait depuis longtemps un autographe de Goethe ; j’eus l’idée de me servir des cédrats comme d’un appât excellent pour tirer de Goethe la poésie que ma jeune amie désirait. Avec la mine d’un grave diplomate, chargé d’une importante

  1. De l’École romantique.