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vantes ; c’est à lui que l’on doit la résurrection scientifique des espèces disparues. Ses Éloges des anciens membres de l’Institut montrent quelle connaissance il a du monde entier ; on voit là aussi avec quelle pénétration il sait entrer dans les caractères des autres savants, et avec quelle puissance son regard s’étend sur toutes les régions de la science.

Que l’on me pardonne la rapidité superficielle de ces esquisses ; je n’ai nullement la prétention d’apprendre quelque chose de nouveau ; je veux seulement rappeler ce que tous ceux qui s’intéressent à ces deux dignes savants savent depuis longtemps.

Maintenant on demandera sans doute : dans quel but et de quel droit les Allemands s’inquiéteraient-ils tant de cette discussion ? Est-ce dans l’intention de prendre parti pour un des combattants ? Je crois d’abord que cette question scientifique devrait intéresser tout peuple civilisé, car le monde savant ne forme qu’une seule nation ; mais nous avons en Allemagne des raisons particulières pour nous en occuper.

Geoffroy Saint-Hilaire cite plusieurs savants allemands comme ayant les mêmes vues que lui ; Cuvier, au contraire, semble s’être formé la plus mauvaise idée de nos recherches en ce domaine, car il dit dans un mémoire du 5 avril (page 24, note) : « Je sais que pour certains esprits, derrière cette théorie des analogues, du moins mal entendue, peut se cacher une très-vieille théorie, réfutée depuis longtemps, qui a été reprise par quelques Allemands pour venir en aide au panthéisme, qu’ils appellent philosophie de la nature. » — Pour commenter chaque mot de cette assertion, pour en bien éclaircir le sens, pour prouver l’entière innocence de ces penseurs allemands, il faudrait presque un volume in-octavo, et nous voulons finir le plus vite possible. — Geoffroy Saint-Hilaire est dans une situation telle, qu’il doit lui être agréable de connaître les travaux des savants de notre pays, et de se convaincre qu’ils ont des pensées analogues aux siennes, qu’ils marchent sur la même voie, et qu’il doit par conséquent attendre d’eux applaudissement et au besoin secours. D’ailleurs, en général, nos voisins de l’Ouest n’ont jamais perdu leur temps lorsqu’ils prenaient quelque connaissance des recherches et des travaux de l’Allemagne. Les naturalistes allemands cités par Geoffroy Saint-Hilaire sont Kielmeyer, Meckel, Oken, Spix, Tiedemann, et on reconnaît en même temps que, nous-même, nous avons consacré trente années à ces études. Ce sont cinquante