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de ces horreurs politiques. Ermengarde meurt ; fille, sœur, épouse de rois, elle ne devait pas être mère de roi ; entourée de religieuses, elle quitte au milieu des tourments une vie sans espérances. Le chœur entre ; et nous donnons ici un résumé de ses strophes pour aider les personnes qui liront cette œuvre sérieusement. 1. Douce peinture d’une mort pieuse. 2. Les gémissements se taisent ; une main amie ferme les yeux ternis, pendant que l’on prie. 3. Dernier appel, pour qu’elle oublie la terre et pense à l’Éternel. 4. Peinture de la situation de cette infortunée, qui ne pouvait oublier son tourment. 5. Dans les nuits sans sommeil, dans les cloîtres, sa pensée retournait vers les jours de bonheur. 6. Quand elle arriva chez les Francs, aimée, et ne prévoyant pas l’avenir. 7. D’une haute colline elle vit son bel époux chasser avec joie dans la vaste plaine. 8. Entouré de son escorte bruyante, il attaquait le sanglier. 9. Frappé par la flèche du roi, l’animal tomba dans son sang ; elle se sentit heureuse et effrayée. 10. Souvenirs de la Meuse et des sources chaudes d’Aix, où le puissant guerrier, déposant son armure, venait se reposer. 11, 12, 13. Belle comparaison bien conduite : semblable à la rosée qui rafraîchit un gazon flétri, une parole amie ranime une âme dévorée de tourments, mais bientôt le soleil brûlant abat de nouveau les tiges si frêles. 14. De même après un court oubli, l’ancienne douleur reparaît. 15. Nouveau conseil de se détacher de la terre. 16. Énumération d’autres malheureuses qui sont mortes comme elle. 17. Léger reproche sur ses ancêtres qui furent des tyrans. 18. Qu’elle aille reposer maintenant avec les opprimés. 19. Que ses traits reprennent leur tranquille expression virginale. 20. Ainsi le soleil qui empourpre les nuages en disparaissant annonce pour le lendemain une belle journée.

Ce qui augmente encore l’effet que produit ce chœur, c’est que, malgré la mort d’Ermengarde, il lui adresse la parole comme si elle vivait et l’entendait encore. Nous ajoutons ici les paroles favorables par lesquelles M. Fauriel a terminé l’analyse de la tragédie ; il ne donne pas aux chœurs la même valeur que nous, cependant il dit : « À les prendre dans leur ensemble, tous les trois sont des productions éminemment distinguées et même uniques parmi les chefs-d’œuvre de la poésie lyrique moderne. On ne sait ce que l’on y doit admirer le plus, de la vérité, de la chaleur des sentiments, de l’élévation et de la force des idées ou d’une expression si vive et si franche qu’elle semble l’inspiration