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lui, c’est : dans les livres de Moïse, l’histoire de la chute, qui rend nécessaire le Sauveur ; dans les prophètes, les allusions qui sont faites au Désiré ; dans les évangiles, le récit de son apparition sur cette terre, et de sa mort sur la croix, qui expie nos péchés. Vous voyez que, à ce point de vue et avec ces idées, on ne peut attacher d’importance ni au noble Tobie, ni à la Sagesse de Salomon, ni aux Proverbes de Sirach.

« Ces questions d’authenticité et de fausseté des livres bibliques sont d’ailleurs bien étranges. Qu’est-ce qui est authentique, sinon ce qui est tout à fait excellent, ce qui est en harmonie avec ce qu’il y a de plus pur dans la nature et dans la raison, ce qui sert encore aujourd’hui à notre développement le plus élevé ? Et qu’est-ce qui est faux, sinon l’absurde, le creux, le niais, ce qui ne donne aucun fruit, du moins aucun bon fruit ? Si on devait décider l’authenticité d’un écrit biblique par la question : ce qui nous est transmis, est-il absolument la vérité ? alors on devrait sur certains points mettre en doute l’authenticité des évangiles, car Marc et Luc n’ont pas écrit ce qu’ils ont vu par eux-mêmes, ils ont recueilli longtemps après les faits une tradition orale, et Jean n’a écrit son évangile que dans un âge avancé. Cependant je tiens les quatre évangiles pour parfaitement authentiques, car il y a là le reflet de l’élévation qui brillait dans la personne du Christ, élévation d’une nature aussi divine que tout ce qui a jamais paru de divin sur la terre. Que l’on me demande s’il est dans ma nature de témoigner au Christ une respectueuse adoration, je réponds : Certainement ! Je m’incline devant lui comme devant la révélation divine des plus hauts principes de moralité. Que l’on me demande s’il est dans ma nature