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— « Il me rappelle Sterne, répondis-je, qui se plaint de n’avoir pas tiré parti de ses souffrances en homme d’intelligence. » — Oui, c’est un mot dans le même genre, dit Goethe. »

Nous parlons ensuite de la Nuit classique de Walpurgis, dont Goethe m’avait lu le commencement il y a quelques jours. « Un nombre infini de figures mythologiques se pressent pour y entrer, mais je prends garde à moi, et je n’accepte que celles qui présentent aux yeux les images que je cherche. Faust est maintenant avec Chiron et j’espère que je réussirai cette scène. Si je m’en occupe assidûment, dans quelques mois je peux avoir fini la Nuit de Walpurgis. Rien ne doit plus me détourner de Faust ; ce serait assez original, si je vivais assez pour le terminer ! Et c’est bien possible, — le cinquième acte est pour ainsi dire fini, et le quatrième se fera tout seul. »

Goethe parla alors de sa santé, s’estimant heureux de la conserver aussi parfaite. « C’est à Vogel que je dois cet état excellent de ma santé ; sans lui voilà longtemps que je serais parti. Vogel est né médecin ; c’est un des hommes les plus doués de génie que j’aie rencontrés. — Mais ne disons pas ce qu’il vaut, pour qu’il ne nous soit pas enlevé ! »

* Lundi, 25 janvier 1830.

J’ai apporté à Goethe les tables que j’ai faites pour préparer une édition des écrits posthumes de Dumont[1] ; Goethe les a lues avec beaucoup d’attention, et a paru étonné de la masse de connaissances, de goûts divers, d’idées, d’études

  1. L’élève de Bentham, mort en 1829. Genève lui doit plusieurs institutions très-importantes.