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ce qui existe et ne change pas, pour le faire servir à un but pratique.

La minéralogie, par exemple, est une science de l’entendement, de la vie pratique, car elle porte sur des objets morts ; dans cette science, il n’y a pas à penser à une synthèse. Les objets de la météorologie, au contraire, sont bien vivants ; nous les voyons tous les jours s’agiter et agir, ils peuvent donc être soumis à une synthèse ; cependant ici les influences réciproques sont si variées, que cette synthèse reste au-dessus de l’homme, et il se fatigue inutilement à faire des observations et des expériences. Nous gouvernons vers des hypothèses, vers des îles imaginaires, et la vraie synthèse restera sans doute une terre inconnue. Cela ne m’étonne pas, car je sais combien il est difficile d’arriver à une synthèse même dans des sujets d’étude aussi simples que les plantes et les couleurs.

Mardi, 17 février 1829.

Nous avons beaucoup parlé du Grand Cophte. — « Lavater, me dit Goethe, croyait à Cagliostro et à ses miracles. Quand on l’eut démasqué comme fripon, Lavater soutenait que le fripon était un autre Cagliostro, et que le magicien Cagliostro était un être saint. Lavater était un homme tout à fait excellent, mais il obéissait à de fortes illusions, et la vérité stricte n’était pas dans ses goûts ; il trompait et lui-même et les autres. C’est là ce qui amena entre nous une rupture complète. Je l’ai vu pour la dernière fois à Zurich, sans qu’il me vît. J’allai déguisé à la promenade, je le vis venir vers moi, je me détournai, il passa devant moi sans me voir. Sa démarche était celle