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Un nombre de personnes encore plus grand était entré dans son cabinet ; cela ne me semblait pas bon, car la présence de tant de monde devait nécessairement vicier l’air et gêner le service du malade. Je ne pus pas m’empêcher d’exprimer mon opinion, et je descendis dans la pièce du rez-de-chaussée, d’où j’envoyai un bulletin à son Altesse Impériale la grande-duchesse.

* Mercredi, 25 février 1823.

Goethe s’est fait rendre compte du traitement que l’on a suivi jusqu’à présent pour lui ; il a lu aussi les listes des personnes qui sont venues savoir de ses nouvelles et dont le nombre était chaque jour considérable. Puis il a reçu le grand-duc, et cette visite n’a pas paru plus tard l’avoir fatigué. Dans son cabinet de travail j’ai trouvé aujourd’hui moins de personnes, et j’en ai conclu avec plaisir que ma remarque d’hier avait porté son fruit.

Maintenant que le mal a disparu, on paraît en redouter les suites. Sa main gauche est enflée et on aperçoit des présages menaçants d’hydropisie. Dans quelques jours seulement on saura ce qu’il faut penser du dénoûment dernier de la maladie. Aujourd’hui pour la première fois Goethe a demandé un de ses amis, le plus ancien de tous, Meyer. Il voulait lui montrer une médaille rare qu’il a reçue de Bohême et dont il est ravi.

J’arrivai à midi, et, lorsque Goethe apprit que j’étais là, il me fit venir près de lui. Il me tendit la main en me disant : « Vous voyez en moi un ressuscité des morts. » Puis il me chargea de remercier Son Altesse Impériale pour l’intérêt qu’elle lui avait témoigné pendant sa maladie. « Ma guérison sera très-lente, ajouta-t-il, mais il