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plicité de l’exposition, qui pouvait servir de modèle aux jeunes gens. Quant à la valeur de la loi, qui, si elle était vraie, trouvait dans la nature entière les applications les plus variées, je n’en entendis pas parler. Pourquoi ? parce que sur ce sujet il n’y avait rien dans Linnée qu’ils pussent copier et donner ensuite à leurs écoliers. Tout montre que l’homme est fait pour croire et non pour regarder et voir par ses yeux. Ils croiront aussi un jour mes paroles et les répéteront ; j’aimerais bien mieux qu’ils soutinssent leurs droits et qu’ils ouvrissent les yeux pour voir ce qui est là devant eux ; mais ils injurient tous ceux qui ont de meilleurs yeux qu’eux, et se fâchent, si on prétend que les vues qu’ils proclament du haut de leurs chaires sont des vues de myopes !

La théorie des couleurs repose sur les mêmes principes que la métamorphose des plantes ; ils feront de même avec elle ; avec le temps ils s’en approprieront les résultats, et il ne faut pas leur en vouloir s’ils la pillent et en donnent les idées comme les leurs. — Cette science si avancée du moine Bacon ne doit pas nous surprendre ; nous savons que de très-bonne heure il y a eu en Angleterre des germes de civilisation, peut-être dus à la conquête de cette île par les Romains. Ces germes, une fois semés, ne disparaissent pas comme on le croit. Plus tard le christianisme s’y développa aussi avec puissance et rapidité. Saint Boniface est venu en Thuringe, ayant dans une main l’Évangile, dans l’autre l’équerre et tous les arts de construction. Bacon vivait dans un temps où déjà la bourgeoisie, par la grande charte, avait gagné de grands privilèges. La liberté des mers, le jury, complétèrent ces heureuses conquêtes. Les sciences devaient marcher en avant comme tout le reste. Bacon leur donna