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néral peu à désirer. Elle est pure et peut presque toujours servir de modèle. Mais j’ai eu souvent bien du tourment avec les Souabes, les Autrichiens et les Saxons. Les natifs de notre cher Weimar m’ont donné aussi bien à faire. Pour eux, les quiproquo les plus ridicules viennent de ce que, ici, dans les écoles, on ne les habitue pas à distinguer nettement en prononçant le b du p, et le d du t. Pour eux, b, p, d, t, ne forment pas quatre lettres différentes ; car ils parlent toujours d’un b doux et d’un b dur ; p et t, on le voit à leur silence n’existent pas pour eux. » — « Au théâtre, ces jours-ci, lui dis-je, un acteur qui a ce défaut a fait une faute très-frappante. Il jouait un amoureux qui a commis une petite infidélité ; une jeune femme lui fait des reproches de toute nature ; impatienté, il devait dire o ende (oh ! finis ! ), mais il prononce le d comme le t ; il s’est écrié : o ente (oh ! canard !) ce qui a soulevé un rire universel. »

— « Le trait est joli, dit Goethe, il mérite une place dans notre catéchisme. »

« — On prononce aussi i pour u, et j’ai entendu une confusion de ce genre très-comique. C’était aussi au théâtre. Une dame se confiait à un homme qu’elle n’avait jamais vu. L’actrice avait à dire : Je ne te connais pas, mais ma confiance repose sur la noblesse de tes traits (deiner züge). Elle prononça l’i pour l’ü, et dit : Ma confiance repose sur la noblesse de ta chèvre (deiner zïege)… »

« Le trait est encore très-bon ; il faut le noter, dit Goethe. On confond aussi g et k, et, dans ce genre de confusion, je me rappelle une faute qu’il faut que je vous raconte. C’était il y a quelques années ; j’étais à Iéna, à l’hôtel ; un matin, un étudiant en théologie se fait annon-