Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t1, trad. Délerot.djvu/103

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

merais bien que vous n’eussiez des relations qu’avec moi. » Je répondis que je voulais rester près de lui et que je n’avais que faire maintenant d’autres relations. Cela lui plut, et il me dit que cet hiver nous ferions ensemble encore maints jolis travaux. Nous parlâmes alors des Ghazeles, et Goethe se félicita de voir que ces poésies sont si parfaites et que notre littérature contemporaine produit, elle aussi, des œuvres de mérite. « Je veux, me dit-il, recommander à votre étude et à votre attention toute spéciale les talents les plus récents. Je voudrais que vous prissiez connaissance de tout ce qui paraît de remarquable dans notre littérature, et que vous me missiez sous les yeux ce qui est digne, afin que nous en parlions dans l’Art et l’Antiquité, et que nous puissions reconnaître la valeur de tout ce qui est bon, noble et solide. Car avec la meilleure volonté, à mon âge, et avec mes mille occupations, je ne peux pas faire cela sans secours étranger. » Je promis de faire ce qu’il désirait, et je vis avec plaisir que Goethe s’intéresse aux écrivains et aux contemporains plus que je ne le pensais. Les jours suivants, il m’adressa les journaux littéraires pour le travail dont nous avions parlé.

Lundi, 1er décembre 1823.

Aujourd’hui j’ai été invité à dîner chez Goethe. J’ai trouvé en entrant Zelter assis à côté de lui. Il était à Weimar depuis quelques jours. Tous deux vinrent au-devant de moi et m’offrirent la main. « Voici, m’a dit Gœthe, mon ami Zelter[1] Vous ferez en lui une bonne

  1. Il reste de l’amitié qui unit Goethe et Zelter un précieux monument : leur correspondance, publiée en 1833 par Riemer (6 volumes). Elle commence en 1799 et se continue jusqu’à la mort de Gœlhe. De cette cor-