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gîtait, vivant pauvrement de quelques maigres petits champs conquis sur la montagne hostile.

Les habitants de la région parlaient arabe, mais la vallée portait le nom berbère de Taourirt et sa forka celui, plus étrange, d’Ouled-Fakroun (les Fils de la Tortue).

Même les plus vieux d’entre les fellahs ignoraient l’origine de ce surnom bizarre… Peu leur importait d’ailleurs : ils étaient bien trop occupés à labourer leurs champs ingrats, à faire paître leurs maigres troupeaux, à fabriquer du charbon et, à l’occasion, à braconner un peu.

Dominant les chaumières de la fraction, au sommet d’une colline nue et rocheuse, s’élevait le gourbi, plus vaste et mieux bâti, de Sidi Bou Chakour[1] , vieux marabout très vénéré dans la région. Près du gourbi, un palmier doum arborescent poussait, et son étrange parasol de feuilles en éventails abritait la natte où le pieux vieillard aimait à s’asseoir, pour méditer, dire son chapelet ou recevoir les pèlerins.

Cependant, Sidi Bou Chakour ne dédaignait pas l’humble et dur labeur du fellah. Il labourait et ensemençait lui-même son champ et surveillait son troupeau que des enfants faisaient paître dans la montagne.

Le bédouin appelle son bétail d’un nom caractéristique :

  1. L'homme à la hache.