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chaque vers, termine en traînant, comme sur une plainte. Enfin, il s’arrête sur un long cri triste, repris aussitôt par la rh’aïta criarde, qui sanglote et qui fait rage, éperdue, comme en désespoir… Et c’est de nouveau le bruissement d’eau sur les cailloux ou de brise dans les roseaux des djouak et des gasba qui reprend, quand se tait la rh’aïta aux accents sauvages… puis la voix sonore et plaintive du rapsode arabe.

Les auditeurs enthousiastes soulignent certains passages par des Allah ! Allah ! admiratifs.

Et le train, serpent noir, s’en va à travers la campagne calcinée, emportant les ziar, leur musique et leur gaîté naïve vers quelque blanche koubba de la terre africaine.

Vers le nord, les hautes montagnes fermant la Medjoua murent l’horizon. De crête en crête, vers le sud, elles s’abaissent peu à peu jusqu’à la plaine immense du Hodna.

Au sommet d’une colline élevée, sur une sorte de terrasse crevassée et rouge, sans un arbre, sans un brin d’herbe, s’élève une petite koubba, toute laiteuse, esseulée dans toute la désolation du chaos de coteaux arides et âpres où la lumière incandescente de l’été jette des reflets d’incendie.