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alluma une vieille petite lampe bédouine, fumeuse.

Alors, s’arrêtant, il considéra son étrange visiteuse. Svelte et élancée, la Juive, sous sa robe de brocart bleu pâle, avec sa gracieuse coiffure mauresque, était belle, d’une troublante et étrange beauté.

Elle était très jeune.

— Que veux-tu ?

— On m’a dit que tu sais prédire l’avenir… J’ai du chagrin et je suis venue…

— Pourquoi n’es-tu pas venue de jour, comme les autres ?

— Que t’importe ? Écoute-moi et dis-moi quel sera mon sort.

— Le feu de l’enfer, comme celui de ta race infidèle ! — Mais Si Abd-es-Sélèm dit cela sans dureté, presque souriant.

Cette apparition charmante rompait la monotonie de son existence et secouait un peu le lourd ennui dont il souffrait en silence.

— Assieds-toi, dit-il, l’ayant fait entrer dans sa chambre.

Alors la Juive parla.

— J’aime, dit-elle, un homme qui a été cruel envers moi et qui m’a quittée. Je suis restée seule et je souffre. Dis-moi s’il reviendra.

— C’est un juif ?

— Non… un musulman.

— Donne-moi son nom et celui de sa mère