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tout d’obscurité et de méfiance farouche… Elle étouffait là, dans cette ombre délétère, parmi des femmes qui parlaient une autre langue et qui l’appelaient dédaigneusement la Kakyle.

Là, une nouvelle torture avait commencé : son beau-père voulait la remarier, la donner à son associé, vieux et laid. La chair d’amoureuse de Taalith se révolta contre l’union sénile, et elle refusa, farouche.

— J’aime Rezki ! répondait-elle à sa mère quand elle lui parlait de sa jeunesse et de sa beauté, pour la décider.

Et c’était vrai. Elle aimait l’époux amant mort, celui dont sa chair gardait le souvenir douloureusement doux.

Mais, devant l’insistance énervante de sa mère et la brutalité de son beau-père qui la battait cruellement, Taalith sentit l’inutilité de la lutte sans issue. Et puis, n’aimait-elle pas le mort, ne lui était-elle pas fidèle, ne se sentait-elle pas seule et incapable d’un nouvel amour ?

Son visage brun aux longs yeux de caresse triste, au front tatoué et à la bouche tendre se raidit, se tira en une maigreur maladive. Une flamme étrange s’alluma dans son regard assombri.

Un jour, elle dit à son beau-père :