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notes sur isabelle eberhardt

Dans ces lettres, que nous communiqua M. Abdul-Wahab, Isabelle Eberhardt explique la nature de sa pensée à Bône, près de sa mère déjà très malade :

« Ici je ne bouge pas, je ne cause pas, j’étudie et j’écris. »

Elle ajoute :

« Peut-être avez-vous deviné que, chez moi, l’ambition de me « faire un nom et une position » par ma plume (chose à laquelle je n’ai guère confiance d’ailleurs, et que je n’espère pas même atteindre), que cette ambition est au second plan.

« J’écris parce que j’aime le « processus » de création littéraire ; j’écris, comme j’aime, parce que telle est ma destinée, probablement. Et c’est ma seule vraie consolation.

À ce momentIsabelle Eberhardtavait déjà commencé le roman qu’elle devait publier, plus tard, sous le titre Trimardeur. Cette œuvre s’intitulait alors À la Dérive.

Dans la correspondance d’Isabelle Eberhardt avec un de ses frères, engagé à la Légion étrangère, celui-ci s’intéresse à ce livre et promet des notes. Il donne aussi ses impressions de légionnaire. Elles sont fort intéressantes.

Dans une de ses lettres de délicate camaraderie intellectuelle, Isabelle Eberhardt explique à M. Abdul-Wahab son « bon garçonisme ».

« En face du monde nous portons, par défiance autant que par crainte des banales consolations que l’on ne manquerait pas de nous prodiguer, un masque impénétrable pour ceux qui, comme la grande, l’immense majorité des hommes, ne nous ressemblent point. Chez vous, c’est le masque de l’impassibilité et presque de l’indifférence. Chez moi, c’est celui d’un bon garçonisme qui