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il se rendit à Guémar, à la zaouïya de Sidi Abd-el-Kader. Un mokaddem lui lut la lettre, puis, le voyant fort perplexe, lui dit :

— Celui qui est près d’une fontaine ne s’en va pas sans boire. Tu es près de notre cheikh et tu ne sais que faire : va-t’en lui demander conseil.

Abdallah consulta donc le cheikh qui lui dit :

— Tu es vieux. D’un jour à l’autre Dieu peut te rappeler à lui, car nul ne connaît l’heure de son destin. Il vaut mieux laisser comme héritage un jardin prospère qu’un monceau de ruines.

Alors, obéissant au descendant de Djilani et son représentant sur la terre, Si Abdallah ploya sous sa doctrine et pria le mokaddem de composer une lettre de pardon pour le ravisseur.

« … Et nous t’informons par la présente que nous avons pardonné notre fille Saâdia ! Dieu lui accorde la raison, et que nous appelons la bénédiction du Seigneur sur elle, pour toujours. Amin ! Et le salut soit sur toi de la part du pauvre, du faible serviteur de Dieu :

« Abdallah bel Hadj. »


La lettre partit.


Oum-el-Aâz, silencieuse et sévère, parlait peu à Saâdia. Elle passait son temps à composer des breuvages et à deviner le sort par des moyens étranges, se servant d’omoplates de moutons tués à la fête du printemps, de marc de café, de petites pierres