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lulu du temps de la monarchie, — derrière un rideau de fougères, dans un coin du grand salon des Phillimore, l’orchestre jouait et sur le parquet ciré, Alec Eden et Sally Phillimore dansaient ensemble. De temps à autre le cavalier faisait un faux-pas, car la nouvelle danse appelée two step venait d’être introduite à Hawaï par un jeune enseigne du Nipsic. Peut-être n’était-ce pas seulement son manque de familiarité avec le two step qui troublait Alec Eden… Ne tenait-il pas dans ses bras l’enfant chérie des îles ?

Les fées semblaient avoir présidé à la naissance de Sally. Outre sa beauté, suffisante pour la faire remarquer dans cette aimable société d’Honolulu elle était l’héritière d’une fortune fabuleuse. Les navires des Phillimore sillonnaient les sept océans et leurs plantations de canne à sucre promettaient une récolte douce et dorée. Baissant les yeux, Alec aperçut sur la gorge blanche de la jeune fille un symbole de son rang et de sa richesse : le fameux collier de perles rapporté de Londres par Marc Phillimore et dont le prix stupéfia tout Honolulu.

Eden, de la firme Meek et Eden, regardait toujours dans le brouillard. Il revivait avec plaisir cette nuit de Hawaï ; nuit magique chargée des parfums de la flore exotique ; il entendait encore les rires insouciants, le murmure lointain du ressac et les notes mélancoliques de l’orchestre hawaïen. Vaguement il se souvint des yeux bleus de Sally. Homme d’affaires approchant de la soixantaine, il revoyait maintenant de façon plus nette les énormes perles qui chatoyaient sur la poitrine de sa cavalière et reflétaient la lumière avec éclat.