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lectif reste toujours perméable à l’analyse rationnelle. C’est une analyse de ce genre qui, dans « Totem et Tabou », tente de montrer comment le sentiment de culpabilité engendre les tabous fondamentaux du totémisme, celui de la mise à mort du totem et celui de l’inceste. On retrouverait dans le complexe d’Œdipe les mêmes désirs réprimés. Ainsi, le mythe du « meurtre du père » dans la horde primitive ne joue pas le rôle mystérieux d’un archétype inconnaissable. Il éclaire notre propre inconscient ou, comme le dit Jacques Lacan, il « structure son langage ».

6. Élargissant son interprétation, Freud voit dans le meurtre du père et dans les sentiments que ce meurtre provoque chez les fils l’archétype de toutes les croyances religieuses. Dans le mythe chrétien, selon Freud, le péché originel résulte d’une offense envers Dieu le Père. C’est seulement dans le sacrifice de l’un de ses fils que l’humanité trouvera l’expiation de l’acte criminel originel. Le fils réalise en même temps son désir à l’égard du père et devient dieu à côté du père. Et même, la religion du fils se substitue à celle du père. La communion chrétienne, dans laquelle les frères réunis goûtent la chair et le sang du fils, serait, selon l’interprétation de Freud, une résurrection de l’ancien repas totémique.

7. La question de savoir si les symboles archétypaux se transmettent par la voie culturelle ou par l’hérédité ne peut être tranchée, d’autant moins que chaque société et chaque individu opère des transpositions qui altèrent plus ou moins profondément le modèle original.


Voir aussi : Inconscient collectif, Jung (Carl Gustav).