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Au milieu des questions nombreuses et complexes qui vont se présenter, on se lassera bien vite des hommes qui, fidèles à l’ignorance, pour n’avoir sur rien des idées préconçues, affectent de recevoir l’inspiration d’un être mystique appelé Peuple, comme les théologiens attendaient celle de l’Esprit-Saint.

Au nom de ce peuple qui ne dit jamais que ce qu’ils veulent, ils passent leur vie à protester contre la majorité qui les réprouve. Il faut qu’ils prennent un parti. Si le peuple souverain n’est autre que la majorité, qu’ils se soumettent et se taisent ; s’il n’est pas la majorité, qu’est-il ?

Le suffrage universel a dépassé, depuis 20 ans, les limites de l’abjection et de la démence tolérables. Non seulement il s’est cru le droit de nous imposer un Bonaparte, mais il a osé, au nom du principe électif, consacrer une monarchie héréditaire, insanité qui ferait sourire de pitié, dans leurs cabanons, les aliénés de Bicêtre.

Pour nous, qui sommes républicains quand même, et qui savons pourquoi nous le sommes, nous déclarons formellement à la majorité qu’elle n‘a pas le droit de nous imposer un roi. Nous défendons la République, et puisque le suffrage universel veut nous l’enlever, nous lutterons contre le suffrage universel.

La République est légitime, non de droit divin ni de droit populaire, mais de droit scientifique et historique. Elle est inévitable et indispensable, donc nécessaire. Or, si tout ce qui arrive n’est pas nécessaire, tout ce qui est nécessaire arrive.

La République est donc arrivée fatalement, malgré la force du nombre et celle de la richesse, malgré l’armée, la police et la magistrature, malgré les clergés, l’Univer-