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LIVRE XV.

II

Telle fut en toute sincérité leur conversation. Pas un mot de plus ni de moins ; et qui pourrait y reprendre une seule parole ? Voici pourtant quelles en furent les conséquences.

Peu de jours après, trois ou quatre, pas davantage, Merlin était sur les côtes de Morée, prêt à s’embarquer pour les Îles. Il venait de descendre de Piada (c’est un endroit fort malsain et semé de flômos). À dix pas du rivage, un sac de peau distendu flottait à la surface de l’eau. Merlin croit s’apercevoir que ce sac s’agite par soubresauts, qu’un mouvement convulsif, tantôt le renverse au-dessus des flots, tantôt, hélas ! le plonge au fond du gouffre.

Sans délibérer, Merlin se jette à la mer. Le mouvement des lames chasse le sac palpitant sous une voûte basse, béante au pied d’un rocher rasant qui s’ouvrait en soupirail, à l’endroit le plus escarpé. Merlin suit à la nage ; il entre dans une caverne marine. Sous une coupole profonde, s’élève au fond une petite corniche, large au plus d’une coudée, seul endroit où le nageur puisse poser le pied. C’est là que vient échouer le sac de cuir. Merlin le saisit ; il le dépose sur la roche ; il l’ouvre à la hâte. Dieu du ciel ! le corps inanimé, glacé de Marina, retombe à ses pieds.