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MERLIN L’ENCHANTEUR.

II

Pendant que les jeux faisaient oublier les heures, Merlin nourrissait de profondes pensées. Il avait attendu que la lassitude des uns, le dépit des autres, sans doute aussi la curiosité de fous, produisissent dans les esprits une diversion dont il comptait profiter pour exposer le sujet de son ambassade. Épistrophius lui ayant fait signe que c’était le moment de parler, il le fit en ces termes, non pas sans avoir invoqué d’abord le dieu inconnu dont il n’avait pu saisir le nom :

« Puissants rois et magnifiques seigneurs, je suis envoyé par le roi des rois, Arthus, pour nouer avec chacun de vous des liens de religion, de politique, de commerce et surtout d’amitié, car vous ne pouvez rester isolés plus longtemps dans ces déserts.

« Regardez-moi, s’il convient à Vos Majestés, comme l’ambassadeur de l’avenir ; ce titre est celui qui répond le mieux aux instructions que j’ai reçues.

« Quel que soit l’éclat de vos fêtes, vous ne pouvez vous faire une entière illusion. Il y a parmi vous un commencement de décadence, faible, si vous le voulez, imperceptible au regard du grand nombre, mais qui, néanmoins, ne laisse pas de percer sous la magnificence de vos solennités. N’attendez point que le mal s’aggrave.