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LIVRE XV.

volcans. Les peupliers d’Italie, entrelacés de vignes amoureuses, s’agitaient à mes pieds comme des thyrses. La cloche des Camaldules sonnait au loin comme pour les noces du printemps. La voile blanche épousait le flot bleu. Et moi, que faisais-je alors ? Que de souhaits insensés se déchaînaient dans mon cœur ? Descendu de la montagne, j’allais mendier un sourire de quelque belle, ou au moins d’une étoile ; et à peine l’avais-je obtenu ce sourire, je fuyais à grands pas, plein de terreur, comme si j’eusse éveillé un serpent ! Voilà la vérité. Tu vois que je ne dissimule rien.

Au milieu de cela, deux ou trois affections sereines, droites, honnêtes, que toi-même tu ne pourrais t’empêcher d’approuver. Ne parlons aujourd’hui que de Marina. Un frère n’a pas pour sa sœur une affection plus pure ; jamais un mot que tu n’eusses pu entendre. Pas une seule caresse, hormis peut-être un baiser fraternel en la revoyant le matin. Des occupations rudes, positives, un père fort avisé, toujours présent, point de rêveries, point de soupirs ; une seule fois une larme versée sur son front, mais elle allait périr. En un mot, rien de moins semblable à l’amour. Quiconque dit le contraire calomnie. Et pourtant le scrupule m’a saisi brusquement. Je l’ai quittée, pendant son sommeil, comme un voleur.

Je l’ai quittée à cause de toi, et aussi pour éviter les vils soupçons, les médisances ou même les commérages des cigales, qui, je ne le savais que trop, ne manqueraient pas de te porter d’autres nouvelles. Vois pourtant