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LIVRE II.

— Je pense, répondit Merlin, que vous voulez parler de la pierre philosophale ? »

Sans lui laisser le temps d’achever, les sages poursuivirent :

« Quelle est votre solution du problème de la destinée ? votre moyen d’enrichir l’espèce humaine en un matin ? car vous sentez qu’il est fort inutile de bâtir ici la moindre masure, si vous ne nous apportez d’abord la vérité finale sur toute matière.

— Rien n’est plus certain, interrompit l’un des sages. Pour moi, je puis bien dire que je touche à la vérité, mais je ne la tiens pas encore tout à fait. Jusque-là, si vous m’en croyez, ne semez, ni ne bâtissez ; tant que je n’aurai pas achevé mon Traité sur le bonheur, ce serait peine inutile.

— Enfin ! reprirent-ils tous ensemble, d’une voix nerveuse et crispée par l’impatience, Merlin ! nous apportez-vous la solution finale, ou prétendez-vous nous tenir plus longtemps ici dans la boue de Lutèce ? Parlez, parlez donc ! »

Le bon Merlin, que tant de questions précipitées commençaient à étourdir, demanda quelques moments de réflexion. Il s’excusa sur ce que l’improvisation ne lui était pas familière. À cette réponse, les sages s’écrièrent avec emportement :

« Vous le voyez ! le malheureux ! il réfléchit ! Il n’a pas de solution qui tranche toutes difficultés pour le présent et l’avenir. Non, il n’en a pas ! Voyez donc ! il s’obstine à penser pour savoir ce qu’il veut dire. Non,