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LIVRE II.

— Nous le jurons. »

Tous ceux qui entouraient le roi Arthus se mirent à répéter après lui, la main haute :

« Nous le jurons ! »

Pour confirmer le serment des seigneurs, la troupe des chevaliers salua de l’épée.

« Donnez-moi aussi vos glaives, que je vois altérés de carnage, dit alors l’Enchanteur ; je les rassasierai. »

Ayant pris dans ses mains les épées, il les baptisa l’une après l’autre ; à la mieux trempée il donna le nom de Durandale.

« Je vous les rends, ajouta-t-il, mieux affilées, afin que vous tranchiez le nœud de la justice. Mais si vous les faites servir à un autre usage, elles se tourneront d’elles mêmes contre votre propre cœur. Si seulement vous méditez d’avance la violence, le sang qui n’est pas encore versé tachera la lame jusqu’à la poignée ; il criera contre vous jusqu’à ce que la terre s’éveille. »

Un seul glaive était resté dans ses mains ; c’était celui de Pharamond le chevelu.

L’Enchanteur en regarda longtemps le fil bleuâtre, après quoi il s’écria, comme si la parole manquait à sa pensée :

« Ô France, vois au moins ce que je fais pour toi ! Combien de fois, race moqueuse, oublieuse, tu me navreras de cette épée que j’ai forgée moi-même ! Elle croîtra d’âge en âge, toujours plus acérée, si bien que la pointe atteindra les colonnes d’Hercule ; et déjà j’en sens la blessure profonde au cœur. Pourquoi, France,