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MERLIN L’ENCHANTEUR.

Le roi Arthus parla pour eux tous. Il dit en s’inclinant :

« Merlin, le plus sage des hommes, si pourtant vous n’êtes pas un dieu, c’est de vous que nous voulons tenir nos sceptres et nos couronnes. Veuillez les enchanter, afin que les peuples nous soient soumis. Car si la force seule s’en mêle, ils sont toujours prêts à se révolter. Mais quand un charme est attaché au joug, ils le portent avec joie ; tout est facile pour eux et pour nous. »

Merlin, qui ne s’était jamais vu dans une assemblée aussi solennelle, se troubla d’abord ; il parut très-ému. Bientôt il se maîtrisa. Il reçut d’Arthus les trente couronnes ; après les avoir touchées et y avoir mêlé ses enchantements, il les rendit aux rois, non pas cependant sans y joindre de sages conseils. Il voulut attacher de ses mains, par des liens de diamant, le bandeau au front de plusieurs, et les oindre de rosée ; ce qu’il fit en particulier pour le grand Arthus, pour Pharamond, et pour le roi des Aulnes, parce qu’ils étaient des chefs de race.

« Vous le voyez, dit-il, j’aime ; c’est pour cela que j’ai reçu mon pouvoir magique. Si je n’aimais pas, malgré ma science puisée auprès de Taliesin, je ne pourrais rien de plus que les autres. Je vous ai dit mon secret ; c’est à vous de m’imiter. Que vos peuples soient pour vous ce que Viviane est pour moi.

— C’est ainsi que nous ferons, dit Arthus.

— Vous le promettez ?