Merlin ; croyez-moi, si je désire voir, moi vivant, le règne de la justice, c’est dans votre seul intérêt.
— Nous vous croyons, répondit Jupiter ; il est certain qu’à la vue de certaines iniquités, si elles duraient, Jupiter ne pourrait plus croire en lui-même. »
À ces mots, Merlin salua une dernière fois les immortels, qu’il laissa également ravis de sa bonne grâce et de sa magnanimité ; pendant qu’ils allaient tout émus se blottir sous des buissons de myrte, il prit un petit chemin bordé de platanes, fréquenté le plus souvent par les tortues.
IV
« Le bon Prométhée vit-il encore ? » s’écria-t-il en se retournant, confus d’avoir adressé si tard cette question aux dieux ? Toutefois, ils l’entendirent ; l’écho répondit :
« Encore ! »
Merlin apprit non-seulement que le Titan vivait, mais que son supplice n’avait fait qu’empirer, à ce point que personne ne pouvait en prévoir la fin.
« Certes, pensa-t-il en lui-même, je ne quitterai pas ces lieux sans avoir mis un terme à de si grands maux. »
Et comme un voyageur qui s’aperçoit trop tard qu’il a oublié de donner leur salaire à ses hôtes, il revint sur ses pas en grande hâte, et fit rougir les immortels