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LIVRE XII.

s’accroitre la sienne. C’est à ce signe seulement que parut sa victoire.

« Cessez le combat, s’écria Diane de Sicile ; tous deux ont mérité le prix. »

Mais, en secret, elle inclinait pour Merlin. Phébus s’en aperçut, et, de colère, il allait briser sa lyre, quand il en fut détourné par ce qui se passait à quelques pas de lui.

Dans un ravelin ombragé d’agnus castus, de caroubiers et d’arbousiers était rassemblée la domesticité des dieux, faunes aux jambes tortes, lamies et lémures sorties effarées des tombeaux, gorgades, empuses armées de rhombes et de tambours d’airain, ténébrions, génies coryciens, harpies et chiens de Jupiter, dryades, centaures, telchines, satyres goulus, aux oreilles et aux cornes de bœuf, et le peuple entier des pygmées. Tous faisaient cercle autour de Jacques Bonhomme. Du haut d’un tertre, Pan, le joueur de flûte, lui jetait des pommes de pins ; Argus, le plus curieux de tous, le couvait de ses cent yeux.

« Êtes-vous le valet de quelque dieu, » lui disaient-ils ?

Pour toute réponse, Jacques leur parlait de son village. Il leur racontait en patois de Bresse le Moine bourru, le Chat botté, le petit Poucet, le Juif errant, la Fée Dentue. À quoi le peuple aux jambes de bouc prit un plaisir incroyable. Surtout les faunes dressaient leurs oreilles velues. Jacques leur enseigna à danser la bourrée et la farandole. Il voulut même es-