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MERLIN L’ENCHANTEUR.

MERLIN.

Et moi je suis la source des pleurs sacrés. Jamais n’a menti l’oracle de Merlin.

PHÉBUS APOLLON.

Que dis-tu ? téméraire ! Souviens-toi de Marsyas ! prends garde que ta dépouille n’aille rejoindre la sienne. Sa peau tannée est suspendue à l’arbre de Delphes.

MERLIN.

Qui pourrais-je craindre ? J’ai lutté dans la nuit contre mon père, le père des éternelles ténèbres ; le grincement des portes de l’Enfer ne m’a pas ébranlé.

PHÉBUS APOLLON.

Crains au moins la lumière du soleil embrasé, et mes chevaux de feu qui se feront une pâture de ta chair.

MERLIN.

Comment craindrais-je les feux du soleil embrasé, moi que n’a pas éclipsé la splendeur du Christ ?


Ainsi continuaient les chants, et nul des combattants ne semblait vaincu ; les dieux avaient peine à comprendre la langue de Merlin ; quelquefois ils le prenaient en secret pour un barbare, mais ils n’osaient le dire. Plus Phébus Apollon perdait sa sérénité, plus Merlin sentait