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MERLIN L’ENCHANTEUR.

laisse au moins entrevoir dans quelque chose. Vraiment il ne peut qu’y gagner. »

Pour s’assurer le cœur de Jacques, cela même n’était pas nécessaire. Dès la première rencontre, le ton familier de ces petits dieux enjoués l’avait subjugué sans peine. Dans leur majesté, rien qui l’effarouchât. Il n’en avait point encore vu d’aussi espiègles, bien moins encore d’aussi ingénieux. Surtout les déesses au visage de fées conquirent son amour aussitôt qu’il les vit. Ayant remarqué que toutes, elles avaient la tête nue, exposée aux autans, il alla promptement, dans la vallée, cueillir des bouquets d’anémones, d’orchis, de potentilles couleur d’argent mat, de fumeterre, de scabieuses bleues marquetées de points noirs, de crocus roses, à quoi il joignit quelques pousses nouvelles de pin encore blanches. Il en tressa de petits chapeaux de fleurs qu’il ajusta, le mieux du monde, sur leurs fronts. Mais il eut l’attention de commencer par Diane de Sicile, qu’il regardait déjà comme étant de la famille.

En outre, il apporta, dans une cage d’osier, un oiseau bleu, couleur du temps, qu’il venait de prendre tout petit dans le nid ; il le mit dans le giron des dieux. Quoique chargé encore à demi de duvet, l’oiseau bleu becqueta dans la robe de Jupiter et de Pallas Athénée, qu’il eut bientôt consolés de l’ingratitude de l’aigle vorace et de la myope chouette ; tous deux les avaient lâchement abandonnés ce jour-là même.

C’étaient là les dons les plus précieux qu’ils eussent reçus depuis nombre de siècles ; ils en récompensèrent