Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur, 1860.djvu/422

Cette page a été validée par deux contributeurs.
410
MERLIN L’ENCHANTEUR.

dieu. Le jour a lui. L’aigle, la cigale, le torrent, le mont, la plaine, la forêt, le scarabée aux yeux d’or, tous redemandent d’une voix embrasée les immortels.

Et moi aussi, puissé-je revoir avec toi le matin printanier sur la cime du mont Lycée, au seuil du temple d’Apollon le Secourable ! Je voudrais que la première aube nous caressât tous deux de son haleine de jonquille, tandis que l’odeur des serpolets et des vignes vierges monterait vers nous des ravins boisés de Phigalée.

Puissé-je encore (s’il est permis d’ajouter un vœu) quand viendra l’heure suprême, ma main dans ta main, exhaler avec toi mon âme sereine dans les temples sereins, sous la voûte d’azur, en même temps que le rossignol chantera dans la vallée d’Ampellone et que l’île de Zante fleurira dans la mer épanouie à nos pieds.

Moins heureux et pourtant digne d’envie, mon héros suit à cette heure la même rampe escarpée ; il n’entend d’abord que le cri des chacals et le hou-hou solennel des chouettes sacrées. Mais à peine a-t-il posé le pied dans la cella du temple, un murmure de voix ailées résonne à ses oreilles. Dans ce concert, il démêle ces mots encore trempés d’un reste d’ambroisie : Andrônte Theônte !

C’était une chanson olympienne au matin qui venait d’éclore sur sa tête. Au même moment, il découvre assis sur les tronçons des ruines une foule de nains qui tous conservent, dans leur air, une singulière ma-