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MERLIN L’ENCHANTEUR.

de ce qu’il voyait se tenait, immobile, les yeux attachés sur les domaines d’Épistrophius. Il n’apercevait que colonnes renversées, fûts brisés, cachés dans l’herbe. D’ailleurs pas un toit, pas une masure. L’étonnement, peut-être aussi la crainte de déplaire enchaînaient sa langue.

« Puisque la discrétion vous empêche de répondre, reprit le roi, et que la nuit s’approche, mes serviteurs que voici vous conduiront reposer dans le palais le plus délicieux que je possède. Allez, Merlin, vous et votre serviteur ; le plus grand bonheur pour moi est de donner l’hospitalité à ceux qui passent. Que ne ferais-je donc pas pour l’envoyé du noble Arthus ? »

Merlin et Jacques suivirent les serviteurs qui les menèrent dans un champ désert où deux degrés de théâtre s’élevaient encore à fleur de terre non loin de la fontaine de Clepsydre. Un petit ruisseau baignait ces ruines en murmurant comme un acteur qui répète son rôle.

« Voilà, dirent les serviteurs, le palais le plus noble du pays. »

En même temps ils ramassèrent un peu de bruyère et quelques broussailles dont ils composèrent une sorte de chevet qu’ils posèrent sur l’un des gradins.

« Seigneur, dirent-ils à Merlin en se retirant, votre couche est préparée. Quant à celle de votre serviteur, elle sera, nous le pensons, sur le degré qui est un peu plus bas. Que les dieux, s’il en est, vous gardent des loups rôdeurs et des chacals. ».

Bientôt la fatigue contraignit Merlin et son serviteur