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LIVRE XI.

compter une troisième qui, passée dans la mâchoire inférieure, remplaçait les rênes. Ces détails sont indispensables pour la connaissance exacte des mœurs, objet que je ne perds pas un moment de vue.

Au signal du roi, tous, ducs, enchanteur, serviteurs, s’élancent à cheval et commencent à trotter, tantôt rasant la mer, tantôt s’élevant sur des montagnes parsemées d’arbousiers, d’agnus-castus et de figuiers d’Inde à la feuille couleur de limon. Dans les troncs entr’ouverts des vieux chênes se dressaient des bergers comme des statues dans une niche d’ébène. Sur la terre rampaient quelques tortues accompagnées de couleuvres à demi déchiquetées par les aigles. J’ai fait des observations sur la nature du sol de Sparte et d’Athènes : il est, en général, calcaire, friable ; il manque un peu d’engrais ; les cendres des héros, mieux aménagées, pourraient en tenir lieu. Mais le temps vole, l’espace grandit devant moi, je suis forcé d’abréger.

Le premier jour ils s’arrêtent à Coron, le second à Nisi, le troisième ils sont à Messène. Comme ils descendaient de cheval, Épistrophius eut un moment de légitime orgueil ; il dit à Merlin :

« Mon cher Merlin, vous voilà ravi de la beauté de cette capitale. Eh bien ! sachez que mon intention est que vous y disposiez à votre gré de tout ce qu’elle contient. Oui, je vous le répète, il n’est rien ici qui ne soit à vous. Et d’abord choisissez votre palais, votre temple. »

Merlin, fort étonné de ce qu’il entendait et plus encore