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LIVRE XI.

Homère tout d’une haleine, car avant de visiter les nations il s’informait exactement de leurs mœurs, de leur degré de richesse, de luxe et même de la moindre de leurs coutumes. Aussi, lorsque l’ancre fut jetée dans l’immense rade de Pylos, était-il parfaitement éclairé sur les institutions des royaumes qui allaient s’offrir à lui. Il n’était point exposé à laisser paraître une surprise qui est le signe d’un manque d’instruction, chose blâmable chez tous les hommes, particulièrement risible et funeste chez un ambassadeur.

Débarqués sur une plage sablonneuse, ils virent sortir d’une caverne quatre hommes demi-vêtus d’une fustanelle, les reins entourés d’une ceinture en lambeaux, une peau de mouton sur les épaules. C’était Épistrophius, roi de Grèce, accompagné de ses deux meilleurs amis, Æthion, duc de Béotie, Hippolyte, duc de Crète, et, je crois aussi, Auguselus, roi d’Albanie. Tous marchaient, en souriant, d’un pas léger qui laissait à peine une trace sur le sable. Ils murmuraient entre eux un faible chant qu’eux seuls entendaient.

Dynasties légères, souriantes, immortelles, les historiens vous ont laissées dans l’oubli ; heureuses encore quand ils ne vous ont pas reproché d’être imaginaires. Ils ne vous ont pas consacré une seule ligne, parce que vous n’avez pas rempli la terre de sang et de meurtres. Les fleurs qui croissent sur les ruines, les abeilles de Candie, les rossignols de Colone, les chœurs de cigale qui se posent au Sunium ou au pied de l’Ithôme, ou dans les landes de l’Arcadie, connaissent seuls vos annales.