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LIVRE X.

III

Il arriva que les portes d’Italie se trouvèrent fermées de barres de fer, comme une geôle ; le seuil était obstrué par tout un peuple d’exilés auquel il était interdit d’entrer. Quelques-uns se frappaient la tête contre un mur d’airain, d’autres, tout courbés, contre l’angle d’un soupirail. Dans cette foule, des milliers de voix s’appelaient, se répondaient, s’interrompaient, se mêlaient, parmi lesquelles on discernait celles-ci :

« Nous sommes exilés de la douce patrie vers laquelle tournent leurs regards ceux-là mêmes qui ne la connaissent pas.

— Comme les feuilles arrachées du citronnier et du pin d’Italie, que la tempête promène de lieux en lieux, nous allons sans savoir où ; mais toujours nous revenons à ce seuil adoré qu’il ne nous est plus permis de franchir.

— Ah ! que l’heure fut cruelle où il nous fallut dire adieu à tout ce que nous aimions ! Aujourd’hui plus qu’alors, elle retentit d’un son funèbre dans notre cœur brisé !

— Depuis ce moment, pas une joie n’est arrivée jusqu’à nous. Étrangers dans un monde étranger, nous avons vu les jours succéder aux jours ; et l’attente fié-