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LIVRE IX.

rie. De ma lance sanglante j’ai fouillé le désert. Je n’ai pas trouvé la coupe. »

Chacun parlait ainsi, tous ajoutaient :

« Vous, Merlin, où l’avez-vous trouvée ?

— Dis-le-leur, toi qui le sais, » repartit le prophète en s’adressant à Turpin.

Alors chacun fit silence. Turpin, se plaçant au milieu des rois et des peuples, parla de cette sorte, tandis que chacune de ses paroles était doucement accompagnée d’un murmure lointain de harpes et de violes, si bien que les anges semblaient répondre à chaque mot :

« Oui, il est ainsi, comme il le dit.

« — Cette coupe, beaux sires, fut ciselée par les bergers et par les rois, et donnée en présent à l’Homme-Dieu pleurant sur la paille dans l’étable de Bethléem.

« — Il est ainsi, comme il le dit.

« — Quand Jésus fut sur la croix et qu’il eut soif, cette coupe l’a désaltéré.

« Le bon Joseph d’Arimathie l’a trouvée dans le sépulcre et l’a donnée aux Bretons.

« Rome a pillé la coupe et s’en est enivrée.

« Après Rome, les Goths y ont bu à loisir.

« Après les Goths, les Huns, sous le bon roi Humbert.

« Humbert me l’a donnée ; je la donne à Merlin.

— Et moi, interrompit Merlin, je vous la donne à tous. » Disant cela, il l’approcha des lèvres d’Arthus qui la passa à Siegfried, Siegfried à Gauthier, Gauthier à Hildebrand, Hildebrand à Lancelot, Lancelot aux infants de Lara, les infants à Antar d’Arabie. Elle fit ainsi