Turpin crut voir le baptistère de son abbaye ; Merlin s’écria :
« Oui, Turpin, croyez-moi ; plus d’une âme sera baptisée à cette source !
— Dans la vraie foi ? demanda Turpin.
— Dans la mienne, » reprit l’enchanteur en déposant sur la rive son bassin d’or ; puis il ajouta : « Plus d’un pèlerin visitera ces lieux ; mais ce seront des pèlerins d’amour ; et il en viendra un plus grand que les autres. De sa bouche découlera un fleuve plus abondant que la Sorgue. »
Pendant qu’ils devisaient ainsi, plusieurs passants se détournèrent de leur route et ils venaient demander à boire à notre enchanteur. Pour lui, il puisait dans la source et il leur donnait de quoi se désaltérer avec le boire amoureux. Alors ils s’en allaient, à demi enivrés et chantant dans une langue gazouillante comme celle de l’hirondelle
Merlin ne voulut pas se retirer qu’il n’eût construit une cabane de feuillage et pratiqué de petits sentiers dans les rochers, à quoi ses compagnons l’aidèrent de bonne grâce.
« Pour qui faites-vous ces sentiers ? lui demandèrent-ils.
— Pour Viviane. Assurément elle viendra s’asseoir ici, en supposant qu’elle n’y soit pas encore venue, ce qui est bien peu probable.