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MERLIN L’ENCHANTEUR.

Christ dont vous n’ayez été le Judas Iscariote aux cheveux écarlates ?

« Votre propre fils vous condamnera : celui-là s’appellera Harold.

« Fils des tempêtes, vous vous abritez derrière les tempêtes et vous dites : « Nul ne viendra jusqu’à moi ; je me ris du ciel et de la terre ; je me ris surtout de la bonne foi des hommes. Les flots vaillent sur moi. »

« Prenez-y garde ! Les flots commencent à se lasser.

« Viendront des vaisseaux sans voiles et sans rames, et ils henniront comme des chevaux de mer.

« Le souffle de leurs narines sera si fort qu’il couvrira de vapeurs la mer verdâtre, et le vent de la justice tout seul les poussera.

« Les îles superbes trembleront quand elles verront que la ceinture de l’Océan a disparu, que l’abîme est comblé, qui sépare Cornouailles et Neustrie.

« Et ce jour-là pèsera l’éternel talion sur l’île homicide des Lords. »


Déjà le vaisseau qui emportait le prophète était loin de la côte ; ses dernières paroles retentissaient encore sur la grève avec les flots en colère. Plusieurs de ceux qui, d’abord, avaient voulu le lapider, commencèrent à se repentir de leur dureté envers le reste des hommes. La peur les avait gagnés. Quelques-uns de ces peuples en devinrent tout pâles : ils le sont encore aujourd’hui.