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MERLIN L’ENCHANTEUR.

enlevé mes vaches et mes chèvres ! Car cela est vrai, monsieur ; pour ces animaux-là je ne me connais plus.

— Il suffit, dit l’enchanteur. N’en parlons pas davantage. Que tu réclames ce qui t’est dû, rien de plus juste, mon ami ; mais tâche, autant que possible, de ne pas employer la violence qui est aussi bien l’arme du méchant que celle de l’homme de bien.

— Je suis donc damné, monsieur ? » s’écria Jacques, et il se prit à pleurer.

Merlin le consola aussitôt par ces mots :

« Songe donc, mon ami, que rien n’est encore perdu. Dans tout ce que je t’ai dit, il ne s’agit que de l’avenir, et non de ce qui est arrivé.

— Cela est vrai ! interrompit Jacques, comme s’il tombait des nues.

— Et il ne tient qu’à toi de faire mentir l’oracle, en tout ce qu’il a de fâcheux pour ta renommée.

— J’y compte bien, monsieur.

— Voyons, comment t’y prendras-tu ?

— Ma foi, monsieur, j’apprendrai à lire, et je demanderai à monsieur l’enchanteur de me prêter un de ses livres ; car c’est beaucoup que d’en avoir pour le moins un dans sa chaumière et de regarder de temps en temps de ce côté.

— Rien n’est plus vrai, dit l’enchanteur ; mais prends garde de ne pas te brouiller la cervelle. Car on a vu, Jacques Bonhomme, de très-honnêtes gens, qui, ayant lu dans les livres enchantés, se sont eux-mêmes ensor-