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MERLIN L’ENCHANTEUR.

VII

Quelle fut la récompense de Merlin pour tant de bienfaits répandus dans le monde ?

Sa récompense, la voici :

Dans un des lieux qu’il avait enchantés, il s’était bâti une demeure à son gré. Vous ne l’auriez trouvée ni assez grande ni assez fastueuse pour vous. Mais elle était justement proportionnée à ses désirs. Peut-être le corps de logis eût été trop sévère, s’il n’eût été égayé aux deux flancs par deux pavillons à pleins cintres romains, soutenus chacun par douze colonnes, en souvenir des douze preux. Autour de ces colonnes s’enroulaient en guirlandes le chèvrefeuille et la vigne sauvage. Une galerie de bois, à balustre de fer, réunissait les deux ailes. Ah ! que souvent elle a résonné sous des pas ou joyeux ou rêveurs !

Au-dessus était un verger de pommiers sacrés qui portaient toujours des fruits et des fleurs ; au-dessous un jardin en pente douce, un peu sauvage, planté de tilleuls. Quelquefois un gémissement sortait des eaux dormantes. Mais la mésange y mettait fin en chevrotant et fuyant d’un vol court et fantasque, comme un esprit follet, de saules en saules.

Il y avait chaque année dans ce pays un certain nombre de jours sereins, dorés, empourprés, tels qu’on n’en