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MERLIN L’ENCHANTEUR.

notre Enchanteur. Il s’élance en barrant le passage au ravisseur, il se trouve en face de lui ; déjà il allait rappeler Virgile et prendre de lui conseil, quand le ravisseur fit réflexion que le lieu était mal choisi pour engager la lutte. Vainqueur, il ne le serait qu’à demi dans ce lieu souterrain. Vaincu, tout l’enfer serait témoin de sa défaite. Aussi se résolut-il sur-le-champ à éviter le combat, bien certain de retrouver un peu plus tard l’occasion plus propice.

Séraphine s’était jetée au cou de son fils et le tenait embrassé.

« Ô mon fils, ô Merlin ! s’écriait-elle, me laisseras-tu descendre parmi les maudits ? Tu es fort, tu es plus puissant que l’enfer. Protége-moi. »

Avant que Merlin eut prononcé une seule parole, Belzébuth en ricanant avait élevé la voix :

« Sois le bienvenu, ô cher fils ! Cette querelle est une querelle d’amour. Ne t’en inquiète pas. Ô joie ! ô transports ! Le père, la mère, le fils, enfin rassemblés ! Quel spectacle ! Cher enfant, contribue à l’union de tes parents ! Sois juge entre eux ! ta sagesse est précoce. Ne faut-il pas, dis-moi, que la bonne mère de famille vive près de son époux ? N’est-ce pas là le plus simple devoir ? Pourquoi donc, je vous prie, braver l’opinion sans nécessité, sans motif sérieux ? Si jamais j’ai mécontenté, impatienté ta mère, je m’en repens. Eh bien ! que veut-on de plus ? Si j’ai eu quelquefois l’humeur maussade, cela tenait en grande partie à la peine que me causait ton absence. De la vivacité dans le caractère, de la