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LIVRE VI.

Appelle-moi, si tu le veux, Yblis, comme les femmes d’Orient, aux noires prunelles. Dis, mon ange ; un enfant ne scelle-t-il pas notre hyménée ? Quoi de plus sacré sur la terre ? N’est-ce pas là un mariage valable, respectable ? Je ne demande qu’à légitimer notre enfant par une union solennelle. Notre fils, Séraphine, où est-il ? Qu’en as-tu fait ? Mon enfant, mon enfant bien-aimé, où est-il ? Ah ! qu’il me tarde de le retrouver et de jouir enfin en toute conscience de ce saint nom de père !

— Je ne suis plus ce que j’étais ! le repentir m’a changée. Les saintes eaux ont lavé mes souillures.

— Appelles-tu souillures le mariage le plus authentique auquel les ténèbres servirent de témoins ? Ne déshonore pas nos beaux jours. Si tu es changée, je ne le suis pas, moi ; je ne le serai jamais. Viens !

— Non ! non !

— Vois-tu, chérie, ne m’oblige pas à employer la force. J’en serais au désespoir. Mais je devrais le faire dans l’intérêt sacré de mon enfant. Je ne puis le laisser croupir déshonoré dans la bâtardise. Il faut que je lui donne honorablement mon nom de famille. Lors même qu’il y aurait quelque incompatibilité, tout doit céder à l’intérêt des enfants. Allons ! sans plus de retard, viens !… Souffre cette douce violence. Elle part de l’amour le plus sérieux, cher ange !

— Personne ne viendra-t-il à mon secours ? Ô mort ! ô nuit ! ô Merlin ! »

C’est ce dernier cri qui venait d’arriver à l’oreille de