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CÉTACÉS NOUVEAU-NÉS,

II. D’une certaine impuissance pour le mouvement chez les cétacés après naissance, et des compensations, au dire des Anciens, s’employant à y remédier.

Le sujet de cette seconde question me fut d’abord fourni par une remarque d’Aristote, donnant un fait de mœurs tout à fait imprévu, dont on s’est depuis lors beaucoup occupé, mais évidemment sans l’avoir compris dans son essence comme dans sa réalité ; de plus, on l’aurait encore si peu employé, qu’il passe, de nos jours, pour ignoré.

Le livre VI, chapitre 12, de l’Histoire des animaux contient ce passage : « Les dauphins et les marsouins ont du lait dont ils nourrissent leurs petits, et, alors que ceux-ci ne sont point encore grands, ils les retirent en eux-mêmes. »

Le lieu où les petits sont abrités reste indéterminé dans ce passage. Gaza, dans sa version latine, croit éclaircir ce texte obscur en substituant à la phrase d’Aristote, ils les retirent en eux-mêmes, une leçon empruntée aux écrits de Pline l’ancien, celle-ci : gestant fœtus infirmos infantiâ. Mais, d’une part, cette substitution présente l’inconvénient de ne point rendre le texte de l’auteur traduit, et, de l’autre, elle ne nous apporte aucune lumière sur la nature du lieu où s’effectue la retraite des nouveau-nés. Camus, dans ses annotations sur Aristote, mentionne que la bouche des mères en est le lieu. Mais ce renseignement, qu’il déclare avoir puisé chez de certains commentateurs, il le rejette et le tient pour un fait incroyable : C’est tout au plus, ajoute-t-il, si l’on peut accorder que ce serait avec les dents que les petits sont saisis. (Il a peut-être pleinement raison).

Pline, qui parle de la grande affection des cétacés pour leurs petits, reste tout aussi inintelligible sur les effets de cette grande tendresse des mères pour leur progéniture : il les montre prenant à tâche de les porter, tant qu’ils ne