l’avouer, je succombai beaucoup plus par paresse,
par impossibilité de résister, que par inclination.
Il faut dire aussi que mon couvent était
bien merveilleusement choisi pour développer
le penchant auquel j’attribue la mauvaise direction
que prennent tant de jeunes femmes. Grâce
à Carmen, le vice y existait et s’y prélassait
comme dans son domaine. Tout au fond du
jardin dans un angle, sur une butte formée de
rochers factices, et que de hauts arbres ombrageaient,
on avait élevé un Calvaire, dont tous
les personnages étaient de grandeur naturelle. En
arrière, sur des bancs, par les belles soirées
d’été, loin des regards curieux, pendant que les
sœurs surveillantes étaient à la chapelle, nous
nous placions toutes en ligne, les grandes confondues
avec les petites, et nous nous livrions en
toute sécurité à nos habitudes funestes.
Deux hommes, deux grands écrivains, Jean-Jacques Rousseau et Chateaubriand, chacun d’eux se plaçant à un point de vue différent, ont eu le rare courage de raconter dans leurs Mémoires, et d’après l’observation qu’ils en avaient faite sur eux-mêmes, les effets du même vice chez les jeunes garçons. Aucune femme, jamais, à ma connaissance du moins, ni même aucun homme, n’avait eu jusqu’ici l’idée de le décrire, en en faisant l’application aux jeunes filles. Cependant,