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D’UNE COCODETTE


quoi que je dise, il n’admettra qu’elle me fait violence, et que je souffre, moi, de ce qu’elle fait. Il me supposera de connivence avec elle, et il va m’étrangler tout net ! »

Ainsi me disais-je. Et, en moins d’une seconde, je m’attendis à comparaître devant Dieu. Déjà, je m’imaginais sentir des mains crispées autour de mon cou.

Mais j’étais un peu loin de compte.

Juste au moment où j’appréhendais de mourir sous l’explosion de la fureur de mon mari, je le vis se retirer vers le pied du lit, à cette place où se tenait madame de Couradilles. Et pendant que cette femme enragée continuait sur moi son travail de Lesbienne, il abusait d’elle sous mes yeux.

Voilà le mari que j’avais ! Très bon enfant, au fond, quand on ne le gênait pas dans ses passions. S’il avait eu l’empire du monde, il l’aurait donné volontiers pour se procurer un nouveau plaisir. Très étonnée qu’il se fût conduit avec tant d’amabilité à l’égard de madame de Couradilles, j’interrogeai celle-ci quelques jours plus tard. À ma grande honte, elle m’apprit que dans cette nuit de débauches, elle avait été de connivence avec mon mari, que la première idée de la chose venait de lui, qu’il lui avait même offert à l’avance une belle somme pour l’amener à se soumettre à ses désirs.