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D’UNE COCODETTE


vous vous adresseriez, n’est-ce pas ? Je serais si heureux de vous venir en aide !

Je répétais tous ces propos à mon mari.

Il en riait aux larmes, malgré ses préoccupations et sa tristesse. Je ne sais pas ce qu’il pensait de moi, mais il me dit :

— Ma chère, ne prends pas ces paroles au sérieux. Ces farceurs seraient enchantés de devenir tes amants, mais ils ne donneraient pas six sous pour cela. Je les connais. Ce sont des pingres.

Quelques secondes plus tard, sous forme de réflexion, il ajouta :

— Ce n’est point ainsi qu’on s’y prend quand on a envie d’une femme.

Il n’avait pas un grain de jalousie, et, quoique tout le long du jour il m’entendît m’écrier : « Qu’allons-nous devenir, grand Dieu ! » il ne modifiait rien dans sa manière d’être. Il caressait sa manie érotique avec autant de soin que, moi, je cultivais celle de la toilette. Quelquefois, en plein jour et à propos de rien, il m’invitait à me déchausser, et me disait :

— Donne-moi ton joli pied à baiser. Et puis, sans même prendre la peine de tirer le verrou, lorsque nous étions seuls dans mon boudoir ou dans mon cabinet de toilette, sans dire gare, il me prenait sur ses genoux, me troussait comme une servante ; et puis, moitié de gré, moitié de force, il tirait de moi tout ce qu’il voulait, en

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