peu le langage de la pure critique littéraire, « j’aime vos livres, et je vous aime aussi. » Ce fut le commencement d’un commerce de lettres, où Browning apportait toute la fougue et l’impérieuse éloquence de son génie, et qui charmait Elizabeth tout en la troublant profondément. Quand Browning lui demande la faveur de lui faire une visite, elle refuse avec une ferme douceur. Mais le jeune homme n’était pas de ceux qui se découragent, et il était de ceux qui imposent leur volonté. Il finit par obtenir gain de cause ; une entrevue fut arrêtée pour le 20 mai.
L’amour inspiré par la lecture des poèmes de la jeune femme était sans doute pure affaire de tête ; après cette entrevue c’était bien d’un amour complet, ardent et absolu qu’il s’agit entre eux. Qui dira s’il doit être expliqué par les similitudes de ces deux êtres de génie ou par leurs différences ?
Tous deux joignaient à d’admirables dons artistiques, une hauteur de pensée qui donne à leur œuvre poétique un caractère exceptionnellement philosophique et profond. Chez tous deux se trouve une superbe indépendance, un parfait dédain des conventions et des règles artificielles. Tous deux avaient nourri leur esprit de la moelle des forts, également épris qu’ils etaient de l’antique beauté grecque, et des œuvres puissantes du génie moderne, qu’une science également étendue leur permettait de chercher dans toutes les langues où elles se sont produites. Tous deux enfin avaient, pour éclairer leur vie, ces deux grandes lumières : un ardent amour de l’art, et une croyance spiritualiste qui avait survécu à la foi religieuse de leur enfance.
Mais que de différences aussi entre ces êtres d’élite ! Elle, si languissante, si délicate et menue, « la plus petite dame ayant vie » a-t-il dit ; créature presque