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LES DÉVOTIONS DE Mme DE BETHZAMOOTH


cun a le sien. Dieu voulait qu’on mît du galbanum dans ses parfums et Madame n’aime pas le galbanum. — Ne parlons plus de cela, dit-elle, et lisez-moi, je vous prie, quelque histoire amusante et surtout qui soit un peu édifiante.

M. de Saint-Ognon reprend la Bible et lit l’aventure du prophète Balaam avec son ânesse. — Voilà, dit Madame, ce que je ne comprends pas que Dieu envoie un ange dans un chemin fort étroit et entre deux murailles pour faire peur à une ânesse, pour la faire rosser et pour la faire ensuite parler et argumenter en théologie comme son maître. Je suis une grande ignorante, mais il me semble que cet ange a tort de reprocher à Balaam de frapper son ânesse. Est-ce qu’un prophète n’avait pas le droit qu’ont tous les meuniers de mon pays et de partout ailleurs de frapper leurs ânes qui ne veulent pas marcher ? Cet ange a encore tort de dire au prophète qu’il l’eût tué si sa bête ne s’était pas détournée pour le laisser passer. Je sens bien qu’un ange est au-dessus d’un prophète, que sa dignité demande des égards. À tout seigneur tout honneur ; mais encore faut-il voir les personnes pour leur rendre ce qu’on leur doit, et Balaam ne