Page:Duvernet - Les dévotions de Mme de Bethzamooth ; La retraite de la marquise de Montcornillon, 1913.djvu/122

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
108
LA RETRAITE DE Mme DE MONTCORNILLON


Cassius, Brutus étaient donc des poltrons ? — Ils étaient pire, lui répliquai-je, que des poltrons, car ils étaient païens. Ils ne se tuèrent que parce qu’ils n’avaient point de religion et faute de courage pour supporter la honte d’être vaincus.

— Suivant cette idée, m’ajoute le colonel de Saint-Leu, un homme qui cherche à sortir de la misère ou à faire fortune est donc un lâche ? car il ne travaille du matin jusqu’au soir que parce qu’il ne peut supporter la médiocrité ou la honte de la pauvreté.

— Ce sont là, lui ajoutai-je à mon tour, des raisons de philosophes ; je m’en tiens aux raisons des théologiens qui valent davantage. D’ailleurs, si vous vous tuez, vous serez damné. — Damné ! me cria-t-il, moi ! damné ! Mais je ne crois pas à l’enfer.

— Homme abandonné ! repris-je, vous ne croyez pas à l’enfer ! et pourquoi n’y croyez-vous pas ? — Parce que, me dit-il, Socrate n’y croyait pas ; Cicéron n’y croyait pas ; Horace s’en moquait ; Lucrèce en riait ; Trajan aussi, Marc-Aurèle aussi, et moi aussi.

— Vous me citez là, lui dis-je, de plaisantes gens, des hommes qui n’étaient pas baptisés, et pour vous répondre sur le même ton, je vous dirai que saint Babilas et saint