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Partout un cri d’effroi retentit ! Les enfants,
Les femmes, à genoux, de leurs bras suppliants
Veulent faire un rempart ! L’homme qui se prodigue,
En vain, veut opposer au torrent une digue,
Il la rompt ! et s’en va toujours, toujours plus fort,
Laissant derrière lui ses ouvrages de mort.
Le fleuve inconscient, ou qui charme ou qui navre,
Porte aussi bien la fleur qu’il roule le cadavre !
Aussi peut-on le voir qui charrie à la fois
Les sanglots de l’enfant et les herbes des bois,
Et bientôt sous ses flots nul ne peut reconnaître
Le vieillard qui se meurt de l’épi qui va naître !

Et c’est fini !… plus rien !… l’Ange veille tout seul !
Et l’eau qui fécondait s’est changée en linceul !

Je n’osais raconter cette affligeante histoire,
Et faire résonner une note aussi noire
Au milieu de vos ris, au milieu de ces jeux !
Vous me pardonnerez, c’est pour les malheureux.

Si j’ai tant insisté sur ces tristes alarmes,
C’est moins pour imposer un tribut à vos larmes,
Que pour vous procurer ici l’occasion
De jouir du bonheur d’une bonne action.
Quels que soient les ennuis que notre France endure,
Il est toujours des mains pour soigner la blessure,
Et dans notre pays plus que partout ailleurs,
Quand nous avons souffert, nous nous sentons meilleurs.

À peine savait-on la fatale nouvelle
Que chacun veut marcher contre l’Ange rebelle