Page:Duval-Thibault - Les deux testaments, 1888.djvu/82

Cette page n’a pas encore été corrigée
89
LES DEUX TESTAMENTS

peu exaltée, elle ne pouvait s’imaginer qu’il ne l’aimait pas autant lui-même.

À la vérité, il était toujours aimable et complaisant pour la jeune fille qu’il, trouvait charmante et sympathique. Il se sentait heureux au milieu de ces bonnes gens paisibles gaies et unies, lui le pauvre orphelin qui n’avait jamais connu les joies douces de la famille.

Il se disait qu’il aurait bien aimé à avoir une bonne mère dévouée, un père bon et sage, des frères joyeux et une petite sœur douce et gentille.

Puis ses pensées, se tournant vers l’avenir, lui traçait un tableau riant et plein d’espérance.

Il se voyait époux aimant et aimé, et père fier et heureux, dans un intérieur confortable qui serait son chez-lui.

Comme il aurait du courage, alors, pour travailler ; comme il oublierait vite les peines, les misères et les souffrances de sa jeunesse malheureuse.

Mais il n’était pas pressé pourtant de chercher à atteindre ce bonheur rêvé, car jusque là il avait connu bien des filles jolies ou bonnes ; mais aucune qui lui eut inspiré un sentiment sérieux.

De toutes les filles qu’il avait connues, Emma était celle qui lui eut inspiré le plus d’amitié, mais cette amitié toute fraternelle n’était pas de l’amour, et Joseph voulait aimer.

Il se disait bien qu’il aimerait à trouver chez son épouse du temps futur, les qualités d’intérieur et la grâce aimable qui distinguaient Emma, mais là s’arrêtait la ressemblance de la jeune fille avec la femme idéale qu’il se représentait toujours comme une sorte d’ange blond aux yeux bleus, qui devait lui apparaître un jour pour dorer sa vie isolée.

Si Emma eut pu lire les pensées du jeune homme, elle ne se serait sans doute pas bercée d’espérance, comme elle le faisait depuis quelque temps.

Mais elle, ne jugeait que par les apparences, si souvent trompeuses ; et apparemment, Joe la trouvait de son goût, puisqu’il venait si souvent à la maison, et semblait tant se plaire en sa compagnie.

Cependant, elle était trop timide et trop réservée pour que le jeune homme put s’apercevoir de l’impression qu’il avait produite sur elle.

Si cela était arrivé, il aurait certainement changé de manière à son égard, et il aurait fait tout en son pouvoir pour la désillusionner tout